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Point de vue n°116

Peut-on négliger l’apport transitoire des voitures hybrides, rechargeables ou non, dans la course à la réduction des émissions de CO2 ?

Georges ANONYMISé (VERSAILLES)

Il apparait de plus en plus que la pénétration des voitures 100 % électriques sera lente, en dépit des « contrats stratégiques de filière automobile » conclus entre les pouvoirs publics et les industriels : au terme de celui qui vient d'être signé le 22 mai 2018, les ventes devraient passer de 1 % actuellement à 6 % en 2022, en incluant les voitures hybrides rechargeables, les pouvoirs publics s'engageant de leur côté à faciliter, y compris fiscalement, l'installation de bornes de recharge, de 20 000 à 100 000 sur la même période. Pour atteindre en 2022 un parc estimé à 1 million de voitures électrifiées (dont 40 % d'hybrides rechargeables). Qui représenteront... 3 % des 35 millions de véhicules légers en circulation. La modestie de ce chiffre montre que la réduction des émissions de CO2 qui en résultera sera lente, très lente, trop lente, alors qu'il y a un double intérêt majeur à initier cette dernière le plus rapidement possible compte tenu : d'une part de la durée de vie des molécules de CO2 dans l'atmosphère, d'autre part des longs délais de remplacement d'un parc automobile dans son ensemble. Ce d'autant plus que les émissions du parc français sont actuellement à la hausse !
Il existe pourtant une solution, moins efficace à long terme mais beaucoup plus immédiate qui semble être négligée : l'hybridation électrique des voitures thermiques, qui n'impose aucune contrainte particulière aux utilisateurs, l'hybridation avec recharge en imposant de son côté moins que les véhicules 100 % électriques, car elle élimine les contraintes et risques d'autonomie insuffisante et n'a besoin que de structures de recharge plus légères, avec moins de recharges rapides. À condition bien sûr que ces solutions soient suffisamment efficaces en termes de réduction des émissions de CO2.
C'est à cette question que tente de répondre la présente étude, qui analyse les mesures de consommations des véhicules hybrides et hybrides rechargeables actuellement disponibles sur le marché (20 de chaque type) relevées en conditions réelles de circulation par la presse automobile, indépendamment des résultats des cycles d'homologation officiels, dont on connait les limites et le peu de représentativité, l'objectif étant ici de coller au mieux à la réalité.
Plusieurs résultats sont mis en évidence concernant le potentiel de réduction des émissions de CO2 résultant d'une hybridation bien ciblée, comparativement aux émissions moyennes des voitures thermiques de même gamme :
* La meilleure des voitures hybrides non rechargeables permet déjà une réduction de plus de 35 % des émissions de CO2 par rapport aux voitures thermiques de même gamme. Performance non négligeable qui devrait pouvoir être généralisée (en ordre de grandeur) à tous les véhicules hybrides,
* Contrairement aux idées reçues, au marketing de leurs constructeurs et surtout malheureusement aux résultats des tests officiels d'homologation actuels (NEDC) toutes les voitures hybrides rechargeables ne sont pas systématiquement moins émettrices de CO2 que leurs homologues hybrides non rechargeables dans les conditions réelles de circulation : les plus performantes en émettent deux fois moins, les moins performantes deux fois plus ! Ces dernières, qui sont toutes des voitures haut de gamme surpuissantes, sont même des impasses écologiques : les plus émettrices d'entre elles (la moitié de l'échantillon) ne font pas mieux que leurs homologues diesel de même gamme en parcours réels diversifiés...
* La faute en revient à la réglementation actuelle fondée sur l'homologation NEDC qui ne délivre pas les bons signaux en homologuant SANS AUCUN MALUS des véhicules qui n'apportent aucun avantage en termes de réduction des émissions de CO2 en conditions réelles de circulation,
* La règlementation doit donc évoluer pour ne favoriser que les voitures hybrides rechargeables réellement performantes en termes de réduction des émissions de CO2, sous peine de consentir à une perte d'efficacité dans la réduction rapide des émissions du parc automobile. Sera-ce le cas de la future règlementation fondée sur l'homologation WLTP applicable à partir du 1er janvier 2019 ? Réponse dans quelques mois...
* Sous cette réserve, l'hybridation avec ou sans recharge est une solution efficace puisqu'on peut en attendre des réductions d'émissions d'au moins un tiers, pouvant selon les cas aller jusqu'à deux tiers par rapport aux véhicules thermiques actuels. Réductions très importantes quand elles sont appliquées à un parc qui pourrait grandir très rapidement à plusieurs millions de véhicules et constituer une génération intermédiaire,
* D'autant plus que les technologies actuelles sont suffisamment matures pour permettre un déploiement sans délai. À condition que les constructeurs, français notamment, proposent (enfin !) dès que possible des véhicules de ce type à des coûts accessibles au plus grand nombre. Ce qui n'a rien d'impossible au vu des productions actuelles de certains constructeurs étrangers, asiatiques essentiellement. L'obligation faite aux constructeurs européens de ne pas dépasser 95 g de CO2/km sur l'ensemble de leurs gammes à partir du 1er janvier 2021 devrait également favoriser cette évolution rapide...

Commentaires

Bravo pour cette étude. Il me paraît en effet peu probable que la voiture électrique fasse la percée escomptée.
Certains (idéologues à mon sens) vont plus loin et prônent la fin de la voiture individuelle.
Je n'y crois pas. L'automobile est source de liberté que les gens n'abandonneront pas.
La voiture toute-électrique a l'inconvénient bien connue de son manque d'autonomie. La voiture hybride apparaît donc comme une solution intéressante.
Beaucoup de foyers ont deux voitures et auront encore besoin d'en avoir deux: la solution d'une petite voiture électrique pour les trajets courts (d'après les statistiques, 80% des trajets font moins de 5 kms) et d'une voiture hybride pour les trajets plus longs serait bénéfique à la fois pour les utilisateurs et le climat.

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