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Avis n°271

Promouvoir la petite hydro-électricité au lieu de détruire son potentiel

Ajouté par Charles ANONYMISé (Saint-Brancher), le
[Origine : Site internet]

Au nom de la réforme dite de "continuité écologique", la France a engagé une politique de destruction préférentielle des ouvrages de moulin et barrages d'usine hydro-électrique, qui sont plusieurs dizaines de milliers en France. La même politique conduit à décourager ou complexifier à l'extrême le ré-équipement hydro-électrique de ces sites anciens. Voire à prendre des décisions radicales, comme le projet de destruction des deux grands barrages de la Sélune dans la Manche, qui sont pourtant en état de fonctionnement.

Ces choix sont mauvais pour plusieurs raisons :
- il existe des solutions non destructrices de continuité, permettant d'atteindre le premier objectif (augmenter la présence de poissons migrateurs à l'amont de l'obstacle) sans faire disparaître l'ouvrage et ses divers bénéfices,
- les sites hydrauliques anciens ont fini par accueillir une faune et flore adaptées, donc le bilan de biodiversité de cette politique n'est pas réellement tiré, et n'est pas forcément bon (ces sites sont aussi des habitats pour les plantes, oiseaux, amphibiens, diverses espèces des zones lentiques et des annexes humides).

Quand un site est déjà en place (chaussée, seuil, digue, barrage), l'équipement de sa chute à fin de produire localement en hydro-électricité est le meilleur choix pour la transition énergétique bas-carbone.

Pour les sites les plus nombreux et les plus modestes (moulins), l'ouvrage peut produire en autoconsommation pour assurer le chauffage non fossile des bâtiments, ou des usages locaux de l'électricité.

Pour les sites de dimensions plus importantes (50 kW et au-delà), le surplus d'électricité peut être injecté dans le réseau, avec divers avantages : production plus prévisible (débit régulier et anticipable à plusieurs jours contrairement au soleil ou au vent) ; bon bilan carbone et matière première (techniques simples, low tech, éprouvées) ; pas d'aggravation de l'usage des sols et des eaux (on ré-utilise le site en place, sans créer un nouvel obstacle à l'écoulement).

On dit parfois que le potentiel hydro-électrique en France est déjà saturé, mais c'est faux : en réalité, 80% des ouvrages en place (incluant aussi des barrages d'irrigation, d'eau potable) ne sont pas équipés aujourd'hui, et il y a des dizaines de milliers de ces ouvrages, de toutes les dimensions, sur tout le territoire. Des solutions adaptées à chaque profil de site (turbines, vis d'Archimède, hydroliennes, roues) existent, avec un tissu industriel français et européen capable de produire cet équipement.

Il est donc souhaitable que la PPE introduise pleinement la petite hydro-électricité dans les choix publics français et fasse en sorte que son déploiement soit simplifié.

Commentaires

Merci !
Tout à fait d'accord avec vous. J'habite près de Nantes. Il n'y a chez nous aucun équipement hydroélectrique. Il y aurait pourtant certainement de quoi faire par exemple au niveau du barrage mobile de pont-rousseau à l'embouchure sèvre-loire et bien d'autres rivières (y-compris avec de petites unités). Le gisement potentiel me paraît immense. Le courant augmente avec l'eau de pluie et les crues et nous pourrions forcément en tirer avantage.
Par contre pourriez-vous me dire si cela pose un problème pour les poissons ou s'il existe des solutions (passes à poissons, protection contre les turbines) et si ces solutions sont efficaces et ne diminuent pas le rendement de production hydroélectrique.
Chez nous, pour la sèvre pas exemple, le problème principal, c'est la pollution de l'eau par les pesticides (traitement des vignes) et aussi l'eutrophisation (lentille d'eau) à cause des engrais chimiques. Il faut donc aussi lutter contre la pollution, qu'il y ait ou non une installation hydroélectrique.
- Lutte contre les pesticides = agriculture bio
- Lutte contre les engrais chimiques = utilisation de digestats d'usines de biogaz (à condition d'avoir du digestat sans métaux lours ou autres polluants). Donc il faut lutter contre la pollution en amont pour ne pas les retrouver dans les digestats.

44230

Bonjour

Les ouvrages hydrauliques ont en effet certains impacts négatifs sur les poissons. Il faut donc les corriger.

A la montaison, l'ouvrage peut bloquer des poissons migrateurs (par exemple anguilles, saumons, aloses) et si ces espèces sont documentées dans le cours d'eau, il convient de concevoir des dispositifs comme les passes à poissons, les rivières de contournement, les rampes enrochées.

A la dévalaison, le poisson peut souffrir de chocs ou mortalité. On considère que les dispositifs lents et à air libre (roues, hydroliennes, vis d'archimède) sont sans impact majeur. Pour les turbines en revanche (qui travaillent sous pression et à vitesse plus rapide), on place des grilles fines à l'amont (20 mm d'entrefer), afin que les poissons évitent le passage exploité et prennent une autre voie de dévalaison, sans choc ni effet de pression.

Comme vous le dites, nos rivières sont très polluées (plus de 500 molécules retrouvées dans les campagnes de suivi du CGDD, des microplastiques, des sédiments fins en excès venus de l'érosion des sols nus). Il y a donc déjà un très gros chantier de protection des eaux et des berges à mener.

A noter : lorsque les sédiments ne sont justement pas pollués, les produits de curage de plans d'eau créés par les digues, seuils ou barrages sont traditionnellement utilisés pour épandre et fertiliser. Logique circulaire où l'on utilise tout ce qu'un site peut donner, en veillant à minimiser les impacts sur le vivant.

PS : les ouvrages hydrauliques ont aussi des atouts pour certains poissons, ceux qui apprécient les eaux lentes (carpes, rotengles, brèmes, chevesnes, etc.). Dans une période où l'on annonce des sécheresses sévères, les retenues de moulins, étangs et lacs sont parfois les dernières zones où l'on trouve un peu de profondeur de lame d'eau en été.

89630

Merci beaucoup pour toutes ces précisions très intéressantes.
En Bretagne, on a énormément de moulins à marée (dans le golfe du Morbihan par exemple avec le moulin de Pen Castel à Arzon). Il serait peut-être possible d'y faire de la petite hydraulique.

44230

Nous avons l'expérience d'une petite chute équipe auparavant d'une turbine .Nous avons remis sa roue et avec une génératrice asynchrone Nous revendons toute Notre production . Nous avons un droit De revente de 55 000 kWh par an que nous n'utilisons que partiellement .Mais en 7 ans Nous avons Tout amorti .et les truites ne se sont jamais aussi bien portes tant qualitativement que quantivement'et sans passe à poissons mais Avec Deux ruisseaux de contournement!!!

62310

Merci à Charles C. pour cette expression que je trouve sage et bien documentée. Merci aussi à Bernard D. et Emmanuel H. pour leurs compléments.
Je souscris sans réserve à cette idée de valorisation de l'énergie de pesanteur (la gravité est infinie donc renouvelable à notre échelle), sur des gisements répartis sur le territoire français, et ailleurs dans le monde. Je suis choqué d'apprendre qu'il existe actuellement une politique préférentielle de destruction d'installations existantes ! Alors qu'un ré équipement, une modernisation, serait bien plus approprié par les temps actuels. Les bienfaits de ces petites unités de production sur le réseau de distribution sont reconnues en termes de tenue de la tension et de réduction des pertes techniques en lignes, devenues ainsi forcément moins importantes.
Les gisements du petit hydraulique sont très importants en moyenne et haute montagne dans les Pyrénées, les Alpes et le Massif Central, et même dans des régions avec moins de dénivelé, mais avec des débits plus élevés.
J'appuie avec conviction la suggestion que la " PPE introduise pleinement la petite hydro-électricité dans les choix publics français et fasse en sorte que son déploiement soit simplifié", afin que ces petites usines locales deviennent une réalité et contribue à la production d'électricité propre.

69100

Merci pour ces différentes remarques et pour la création de cette conversation! Je milite également pour que la "PPE introduise pleinement la petite hydro-électricité dans les choix publics français et fasse en sorte que son déploiement soit simplifié"!!

Je souhaite compléter vos remarques de quelques petits points simples à comprendre par et pour nos politiques.

Les objectifs des micros centrales hydroélectriques :

Les petites centrales au fil de l’eau produisent une énergie abondante et de qualité. Elles apportent des revenus stables à ses propriétaires et exploitants. Elles peuvent permettre à des communes rurales de développer des activités économiques, générant des emplois locaux.

Issu du cycle de l’eau, l’énergie hydraulique est renouvelable, l’eau traverse la vis ou la turbine et est restitué entièrement à la rivière, sans pollution. Elle ne génère ni gaz à effet de serre, ni gaz polluant, ni déchet.

Leur fonctionnement :

Une centrale hydroélectrique au fil de l’eau est composée d’ouvrages de prises d’eau (chaussée ou barrage), d’un canal d’amené, d’équipement de production d’énergie (vis ou turbine, générateur, système de régulation, transformateur) et d’un canal de fuite.

L'exemple de la vis d'Archimède :

Une vis d'Archimède est constituée d’une vis tournant à l’intérieur d’une auge ouverte et fixe. L’énergie potentielle de l’eau qui s’écoule à travers l’installation est transformée en énergie mécanique grâce à la rotation de la vis. Cette énergie mécanique est ensuite transformée en électricité à l’aide d’une génératrice.

Les turbines à vis d'Archimède s’adaptent aux hauteurs de chutes comprises entre 1,5 et 4 mètres et pour les rivières de débit supérieur à 10 m3/s. Cette technologie convient particulièrement aux fortes variations du débit.

Avantages de la vis d’Archimède :

Prix d’achat de la turbine nettement plus bas que les turbines dites « traditionnelles » ;
Faibles coûts de génie civil ;
Conception simple, maintenance aisée, faible coût d’exploitation ;
Longue durée de vie ;
Possibilité d’intégration dans un barrage ;
Pas besoin de grille fine, peu de perte de charges et impact minimal sur l’environnement aquatique (les poissons peuvent passer au travers sans aucun dommage) ;
Possibilité d’exploiter de faibles chutes avec de hauts rendements ;
Fiabilité en cas de faible débit (rendement de 75 % à partir d’un débit de 20 %) ;
Accès faciles aux équipements de production ;
Oxygénation de l’eau contribuant à l’amélioration de la qualité des cours d’eau.

Il existe de nombreuses autres applications hydroélectrique à développer bien entendu : hydroliennes, roues à aube, turbines traditionnelle de type kaplan ou autre avec dégrilleurs!

Mais ce secteur à besoin d'une volonté politique marquée pour ce développer!!

Il serait bon que nous prenions conscience qu'il existe des solutions hydroélectriques rentables qui respectent voire améliorent la continuité écologique des cours d’eau!!

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