Question n°295
Sortir à la fois du nucléaire et du charbon : un luxe risqué
le ,La Fondation Heinrich Boell est un pilier historique de l'Energiewende allemande. Elle a toujours soutenu la sortie du nucléaire et le développement massif des ENR. Mais son étude de 2015 prévoit qu'en 2035, il y aura en Allemagne 80 GW de capacité de production électrique gaz/lignite/charbon, le lignite ne disparaissant qu'après 2050. Cet exemple illustre la grande prudence qui prévaut en Allemagne, chez les acteurs les plus engagés, lorsqu'il s'agit des intérêts économiques et industriels majeurs du pays. En France, des responsables de ces questions au plus haut niveau (Gouvernement et Administration) expriment à tout propos leur dégoût (additionné de repentance) pour le nucléaire, et leur refus catégorique du charbon. Est-ce une politique habile et responsable ? Et quelles compensations ont-ils demandées et obtenues de l'Allemagne pour la fermeture des 2 tranches de Fessenheim (qui était à l'évidence un geste politique) ?
Votée en 2015, la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte (LTECV) fixe l’objectif de 50 % de production d’électricité par du nucléaire à l’horizon 2025, ainsi que des objectifs ambitieux aux filières renouvelables.
La diversification du mix énergétique a notamment vocation à renforcer la sécurité d'approvisionnement en électricité, ainsi que l'a rappelé à plusieurs reprises l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN).
Il est en effet important de disposer de marges suffisantes dans le système électrique pour faire face à l’éventualité de suspendre simultanément le fonctionnement de plusieurs réacteurs qui présenteraient un défaut générique grave. Un exemple de tel défaut générique est l’anomalie de concentration en carbone de l’acier qui a affecté les générateurs de vapeur de douze réacteurs à l'hiver 2016. Le développement des énergies renouvelables contribue ainsi au renforcement des marges d'approvisionnement susceptibles de pouvoir faire face à de tels événements.
Le Plan climat a annoncé la fermeture des centrales électriques au charbon d’ici la fin du quinquennat actuel, comme vous le rappelez dans votre question. Les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre ne permettent pas d’envisager d’augmenter les autres productions d’origine fossile. Le gouvernement doit donc organiser la substitution progressive des centrales nucléaires par les filières renouvelables sans remettre en question la continuité de l’approvisionnement en électricité des consommateurs français.
La reconversion du territoire autour de la centrale de Fessenheim qui a été engagée par le gouvernement dans une démarche de gouvernance large associant l’ensemble des parties prenantes locales se fait également en étroite coopération avec les autorités locales ou économiques allemandes.
Commentaires
Pas de merci
La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte (LTECV) fixe l’objectif de 50 % de production d’électricité par du nucléaire à l’horizon 2025, ainsi que des objectifs ambitieux aux filières renouvelables, est aberrante, elle augmente la quantité de CO2 produit en France. C'est une loi partisane qui favorise le réchauffement climatique. Le pôle Nord , les îles Tuvalu, le Groenland, la Sibérie...et toute la Terre, ne lui disent pas merci.
Complément pour l'Allemagne
Un autre chiffre sur la TE allemand.
Alors qu'Angela Merkel a fait de la lutte contre le CO2 une priorité du G20, l'Allemagne se prépare à rater ses propres objectifs de réduction d'émissions de CO2 de 40 % entre 1990 et 2020, selon les estimations du ministère de l'Environnement. Au lieu d'une baisse globale de 34,7% prévue dans un rapport en mai dernier, celle-ci devrait être comprise entre 31,7 et 32,5%.
Titre: Remarques sur la réponse
Je vous remercie de votre réponse, qui appelle de ma part les remarques suivantes:
1-S'agissant de l'objectif de 50% d'électricité nucléaire en 2025, le gouvernement a acté que cet objectif n'était pas réaliste et ne sera pas tenu. Les objectifs en matière d'isolation des bâtiments et de transports sans CO2 le seront-ils? Je l'espère. Mais je crains que les objectifs ambitieux pour le développement des ENR ne les mette à mal (On en prend le chemin).
2-L'objectif de tranquilliser l'ASN, cher à Mr Beaupin dès 2014, me parait un peu spécieux (voir nos échanges à propos de la question 254)
3-S'agissant des négociations au sein de l'Europe: je constate que la ligne de conduite allemande a été définie par Mr Sigmar Gabriel en 2014: "On ne peut pas sortir à la fois du nucléaire et du charbon". Mr Gabriel est aujourd'hui ministre des affaires étrangères, et s'emploie à faire oublier à l'Europe l'intérêt d'une taxe CO2. En France, N. Hulot veut sortir du nucléaire et du charbon (Pour le gaz: je ne sais pas trop…)
4-Sur le fond: je continue à vous recommander la lecture des documents de la fondation H. Böll: c'est un excellent exemple de la Realpolitik appliquée à l'Energiewende.