Point de vue n°234
La transition énergétique, un enjeu d’excellence et de développement économique
Nous assistons, aujourd’hui, à une mobilisation forte de l’ensemble des acteurs de notre territoire autour de la transition énergétique et plus particulièrement autour du développement des énergies bas carbone.
En premier lieu, nos collectivités territoriales locales soutiennent activement cette transition comme une réponse aux défis qui se dressent devant nous : impératif climatique, lutte contre la pollution atmosphérique, réduction de notre dépendance énergétique, développement des nouveaux modes de collaboration, création d’emplois, différenciation des territoires, valorisation des ressources locales – qu’elles soient matérielles ou immatérielles (ressources humaines, compétences, …) - etc. Concrètement, cela se traduit par un positionnement politique stratégique et partagé sur les perspectives énergétiques locales : Plan Climat, Territoire Hydrogène, organisation de l’évènement international sur l’éolien offshore flottant, etc. C’est par le biais de ce positionnement commun que le développement des énergies bas carbone pourra se manifester de façon massive.
Ce soutien politique auquel nous assistons s’appuie également sur un tissu économique fort. A l’échelle du territoire de la Métropole Aix Marseille Provence, la filière énergie constitue une de nos filières d’excellence. La filière se structure en plus de 3 300 établissements et représente plus de 24 000 salariés sur notre territoire.
Autant d’acteurs économiques et d’emplois en attente d’une stratégie énergétique ambitieuse. Cette volonté partagée démontre bien l’engagement de l’ensemble des acteurs dans l’atteinte des objectifs nationaux ambitieux autour de la transition et de la diversification énergétique.
Notre tissu économique est déjà mobilisé et se tient prêt. Notre territoire compte plusieurs acteurs économiques et éducatifs autour des ruptures et innovations technologiques : pôles de compétitivité (CapEnergies, Mer Méditerranée), technopôle de l’Arbois, Aix Marseille Université, start-ups dédiées aux nouvelles énergies, etc.
En parallèle, nous pouvons compter sur nos entreprises historiques relais indispensables jouant un rôle de facilitateur permettant d’amorcer et de développer efficacement les différents projets : investissements dans les structures porteuses d’innovation, mise en place de partenariats autour de la R&D, consommateurs des nouvelles productions énergétiques, etc. A titre, d’exemple, nous pouvons citer :
• La démarche PIICTO visant le développement de synergies industrielles,
• Les réflexions actuelles pour valoriser l’Hydrogène fatal par le biais de la démarche labellisée Valhydate,
• L’appel à Manifestation d’Intérêt Industry’Nov qui couvre trois plateformes industrielles de notre territoire. Cet AMI vise à accueillir, dans du foncier économique disponible, des entreprises innovantes sur les énergies bas carbone. Ce projet a pu être initié par la force du jeu collectif d’acteurs publics et privés : CCIMP, Métropole Aix Marseille Provence, Provence Promotion, Région SUD-PACA, Etat, Grand Port Maritime de Marseille, Total, KemOne, LyondellBasell, Piicto, Novachim,
• La mise en place de nouvelles activités autour des énergies bas carbone au sein des entreprises internationales dans une optique de diversification,
• Le projet VasCo 2 qui consiste à fabriquer du biocarburant à partir d’algues et du recyclage des fumées des industriels.
Enfin, notre territoire dispose d’infrastructures locales d’envergure permettant d’accélérer le déploiement de solutions bas carbone : infrastructure portuaire (ZIP de Fos et bassins Est), présence de réseaux énergétiques résilients, performants et disposant des capacités d’accueil de l’énergie …
Ces atouts soulignent bien l’opportunité que représente la transition énergétique pour notre tissu économique et en corollaire, les attentes fortes vis-à-vis de la Programmation Pluriannuelle de l’Energie.
Il est nécessaire que cette future programmation devienne un outil ambitieux intégrant l’ensemble de ces enjeux et permettant de faire rayonner la France et ses acteurs économiques à l’échelle internationale sur les énergies bas carbone. Ce rayonnement permettra de créer, conforter, rendre visible et exporter nos filières industrielles excellence.
Pour cela, la PPE doit impérativement :
• Apporter une vision stratégique et prospectiviste sur l’évolution du mix énergétique français en corrélant les différents enjeux énergétiques, économiques, climatiques et sociaux. Cette vision claire et chiffrée est indispensable pour assurer la compétitivité de la France et de nos entreprises (baisse de la facture énergétique, développement des ruptures technologiques, etc.).
• Fixer des objectifs ambitieux et donner une visibilité indispensable au développement des différentes filières.
• Faciliter et accélérer les mises en œuvre des projets afin de faire émerger les innovations technologiques (simplification règlementaire, droit à l’expérimentation, instructions optimisées des dossiers, etc.).
Plus particulièrement, nous apportons des recommandations sur deux technologies et filières clés que représentent l’éolien offshore flottant et l’hydrogène :
L’Eolien Offshore Flottant (EOF) :
L’éolien offshore flottant représente une opportunité majeure pour la France pour atteindre les objectifs nationaux et internationaux de la transition énergétique. En effet, l’EOF est basé sur une technologie de production renouvelable, propre et compétitive. A titre d’exemple, une production envisageable de 3 GW équivaudrait à la production actuelle de l’ensemble du parc thermique fossile.
De plus, cette technologie présente plusieurs avantages : une emprise maritime limitée, la création d’emplois qualifiés et non délocalisables, le développement des compétences et des savoir-faire exportables sur les marchés internationaux.
La France est plutôt bien positionnée de par ses investissements conséquents dans la validation de cette technologie d’avenir. Les retombées seront significatives pour les territoires concernés et plus particulièrement la région Sud Provence Alpes Côte d’Azur - qui accueille la plus avancée des quatre fermes pilotes. D’après une étude sur la filière, nous estimons que les retombées économiques pour les entreprises de PACA peuvent atteindre 3 milliards d’euros. C’est pourquoi, localement, nous souhaitons se voir développer, dès les premiers appels d’offres, des fermes de production sur notre territoire.
La poursuite du soutien massif de l’Etat nous semble primordial, au regard de l’étape actuelle d’amorçage, pour changer de braquet et consolider une industrie française de pointe :
• Inscrire un objectif spécifique à la filière Eolien Offshore Flottant de 6 GW en service d’ici 2030.
o Donner une perspective pour justifier d’investissements sur des équipements structurants.
o Cranter le déploiement en fixant des points d’étapes à atteindre à des échéances intermédiaires.
• Initier dès 2019 un premier lot d’appels d’offres pour des fermes de production.
o Maintenir notre avance dans un contexte mondial d’intensité concurrentielle forte.
• Définir un rythme de développement avec un calendrier réguliers d’appels d’offres.
o Permettre une mise en service échelonnée dans le temps compatible avec les enjeux industriels et la monté en puissance de la chaine d’approvisionnement.
• Déployer des fermes de production simultanément sur chacune des trois régions françaises.
o Conforter les dynamiques encore fragiles et les investissements des régions Bretagne, Occitanie et Provence Alpes Côte d’Azur et disposer de volumes compatibles avec le développement de la filière sur l’ensemble des façades maritimes françaises
• Optimiser les phases d’instruction administrative et raccourcir les délais de mise en œuvre des projets.
o Coordonner les interventions des différents services instructeurs.
• Engager au plus vite les études sur le sujet des raccordements au réseau électrique et étudier la possibilité de raccordements par grappes.
o Dérisquer les zones en matière de raccordement.
o Anticiper l’évolution des gabarits des éoliennes (corrélation taille/puissance des machines) en dérisquant les conflits d’usages liés aux hauteurs sur les zones d’exploitations, mais également sur les lieux d’assemblage et de stockage en phase de construction.
L’hydrogène :
Les productions électriques à partir d’énergies renouvelables présentent une contrainte majeure par rapport aux énergies conventionnelles : leur intermittence. D’après une étude nationale pilotée par l’ADEME, il sera nécessaire de gérer 75 TWh d’excédents de productions électriques d’ici 2050 d’où l’intérêt de développer les solutions de stockage de l’électricité.
Pour stocker l’électricité excédentaire, le vecteur Hydrogène apparait comme une solution technologique d’avenir. En plus de sa capacité à redistribuer de l’électricité, ce vecteur énergétique peut être : injecté dans les réseaux gaziers (en direct ou avec la technologie « Power to Gas »), utilisé comme carburant dans les transports ou encore utilisé dans les applications industrielles.
Les acteurs publics et privés ont conscience de la potentialité de cette filière énergétique (création de valeurs sur les territoires, développement des emplois, exportation de nos savoir-faire, etc.). Le territoire Aix Marseille Provence dispose de plusieurs atouts pour consolider cette filière économique : la présence d’Hydrogène fatal valorisable, le développement de démonstrateurs (démarche Valhydate, projet Jupiter 1000), l’existence d’un réseau de pipeline d’hydrogène, …
L’inscription de l’hydrogène dans la PPE est indispensable pour poursuivre le développement de cette filière et consolider son modèle économique. C’est pourquoi, nous préconisons de :
• Mentionner des objectifs spécifiques en matière d’hydrogène vert et d’hydrogène fatal au sein de la PPE et pour ses différents usages (stationnaire, stockage, mobilité, usage dans les process industriels)
• Définir un cadre règlementaire pour les différents usages de l’hydrogène et mettre en place une fiscalité attractive en la matière
• Initier régulièrement des appels à projets sur les différents usages de l’hydrogène
• Intégrer l’ambition de la feuille de route Hydrogène présenté en juin 2018 dans la PPE, à savoir :
o 10% d’hydrogène décarboné dans l’hydrogène industriel d’ici 2023,
o 5 000 véhicules légers et 200 véhicules lourds fonctionnant à l’hydrogène d’ici 2023,
o La construction de 100 stations hydrogène d’ici 2023.