Question n°230
Justification des ENRi sur la base d'un défaut générique du parc nucléaire
le ,En étudiant les réponses déjà disponibles du MOA aux questions portant sur les motivations de baisser la part de la production d'électricité nucléaire et le développement massif des ENRi, on ne trouve qu'une seule justification toujours formulée de la façon suivante :
"Si l'énergie nucléaire constitue d'un point de vue des émissions de gaz à effet de serre un atout, sa forte proportion est également susceptible de dégrader la robustesse du système électrique. L'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a ainsi rappelé à plusieurs reprises qu'une des vocations de la diversification du mix électrique était de renforcer aussi la sécurité d'approvisionnement en électricité. Il est en effet important de disposer de marges suffisantes dans le système électrique pour faire face à l'éventualité de suspendre simultanément le fonctionnement de plusieurs réacteurs qui présenteraient un défaut générique grave. Un exemple de tel défaut générique est l'anomalie de concentration en carbone de l'acier qui a affecté les générateurs de vapeur de douze réacteurs à l'hiver 2016 qui n'étaient ainsi pas disponibles au cours de l'hiver.
En diversifiant le mix électrique, le développement des énergies renouvelables électriques que poursuit le Gouvernement contribue au renforcement des marges d'approvisionnement susceptibles de pouvoir palier de tels événements sur le parc nucléaire."
Cette réponse amène les remarques et questions suivantes :
1) Comment peut-on imaginer remplacer des moyens de production mobilisables de fortes puissances par des moyens de production intermittents par définition non mobilisables à la demande ?
2) La seule réponse possible serait de construire d'autres moyens mobilisables à la demande comme des centrales à gaz ou à charbon... Ou bien des centrales nucléaires de conception différentes ne présentant pas un défaut générique au parc existant. Ce pourrait être des réacteurs à neutrons rapides par exemple.
3) L'exemple de défaut générique donné à titre d'illustration n'est-il pas à lui seul la démonstration que le motif invoqué n'est pas vraiment justifié ? L'arrêt de 12 réacteurs nucléaires en 2016 n'a pas conduit à un black out du réseau en France. Peut-être aussi parce que nous avions alors 58 réacteurs en exploitation. Qu'en aurait-il été avec 20 réacteurs nucléaires de moins et plus aucune centrale à charbon ou au fuel ?
4) Quelle a été la contribution des ENRi (solaire et éolien) pendant cette phase d'arrêt des 12 réacteurs nucléaires en 2016 et quelle devrait être la puissance installée en ENRi et en capacité de stockage d'électricité pour compenser la production de ces 12 réacteurs ?
Nous vous remercions de votre contribution qui nourrit notre réflexion pour l’élaboration de la Programmation pluriannuelle de l’énergie.
1-2) L’éolien et le photovoltaïque, qui représenteront l’essentiel des développements d’électricité renouvelable dans les prochaines années, sont en effet des sources d’énergie non pilotables : elles produisent en fonction du vent ou du soleil et pas de la consommation.
Le bilan prévisionnel 2017 publié par RTE montre toutefois que la sécurité d’approvisionnement électrique peut être assurée avec des taux d’énergies renouvelables importants à l’horizon 2035 (jusqu’à 49 % dans le scénario Ampère), des fermetures de centrales nucléaires (jusqu’à 16 réacteurs d’ici 2035) et sans recours à des centrales thermiques. Le détail de ces analyses est public et disponible sur le site de RTE.
3-4) L'arrêt de 12 réacteurs nucléaires en 2016, décidé par l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) afin de vérifier la qualité des cuves concernées en raison du constat d’un défaut générique, n'a certes pas mis en danger la sécurité d’approvisionnement en électricité, comme vous le soulignez, mais a provoqué un recours accru aux centrales fonctionnant à base d'énergies fossiles comme le charbon ou le gaz et ainsi contribué au non-respect en 2016 des objectifs d'émissions de gaz à effet de serre que la France s’est fixés, d’après les indicateurs de suivi de la Stratégie nationale bas-carbone publiés en janvier 2018. Cet exemple illustre ainsi la nécessité de développer d’autres sources de production à base d’énergie renouvelable et d’autres moyens de flexibilité, notamment sur la demande.
Le site Eco2Mix de RTE donne la composition du mix électrique pendant la période que vous mentionnez, sur le mois de janvier 2017 notamment. Sur cette période, l’éolien a ainsi contribué jusqu’à 7 GW à la production d’électricité. En journée, le solaire a contribué jusqu’à 3 GW. L’hydraulique a contribué jusqu’à 13 GW. Les analyses proposées par RTE dans le scénario Ampère permettent d’évaluer les capacités en énergie renouvelable qu’il est nécessaire de développer pour substituer la fermeture de centrales nucléaires.
Commentaires
Surréaliste
La réponse de la MO est pour le moins déconcertante:
1-2) L’éolien et le photovoltaïque, qui représenteront l’essentiel des développements d’électricité renouvelable dans les prochaines années, sont en effet des sources d’énergie non pilotables : elles produisent en fonction du vent ou du soleil et pas de la consommation.
et "en même temps":
Le bilan prévisionnel 2017 publié par RTE montre toutefois que la sécurité d’approvisionnement électrique peut être assurée avec des taux d’énergies renouvelables importants à l’horizon 2035.
C'est de la magie...
Et contrairement à ce qui est dit, l'hiver 2016/2017 on a frôlé la catastrophe, ne devant notre salut qu'au charbon allemand.
Le scenario RTE "colle" car il prend des taux de disponibilité des ENR irréalistes (10 fois plus que leurs collègues allemands) et la baisse du nombre de centrales n'est pas le fait de l'accroissement des ENR, mais d'une supposée diminution de la consommation complètement farfelue, alors même qu'il faudrait au contraire, pour des raisons écologiques et géopolitiques, passer des consommations fossiles à l'électrique.
Quelle réflexion les contributions nourrissent-elles exactement
Pardon d'avance pour le ton ironique de mon commentaire, mais prenez-le comme une sorte de politesse du désespoir face au mur auquel se heurtent les questions soumises par les contributeurs au débat.
Si je comprends bien la réponse de la MO, on va fermer des centrales nucléaires rentables, pilotables, agréées par l'ASN, et produisant depuis 40 ans de l'électricité décarbonée parce que : lorsqu'il arrive une fois par décennie que certaines d'entre elles ne fonctionnent pas simultanéement de manière temporaire pendant quelques semaines, on est alors obligé de compenser avec des énergies fossiles qui produisent du CO2 et d'autres polluants atmosphériques ; et que le fait d'avoir moins de centrales nucléaires, plutôt que d'entretenir/améliorer les anciennes et d'en construire/développer de nouvelles plus fiables, va permettre d'améliorer cela. C'est bien ça ?
En parallèle, lorsque les éoliennes ne fonctionnent pas parce qu'il n'y a pas de vent, et que les panneaux photovoltaïques ne produisent rien parce qu'il fait nuit, on est aussi obligé de compenser avec des énergies fossiles qui produisent du CO2 et d'autres polluants atmosphériques, mais là c'est très bien (rendez-vous compte, il est même arrivé que parfois, en journée et dans des conditions favorables intervenant en moyenne 15% du temps, elles arrivent - presque - à compenser à elles seules l'arrêt pour inspection des 12 centrales !). On va juste en importer et installer 6 à 7 fois plus - pour le prix de deux fois l'ensemble du parc nucléaire français actuel - de manière à compenser cela, en moyenne. Et puis quand ça sera l'hiver, qu'il fera nuit sans un souffle de vent, et qu'on n'aura plus assez de marge de production d'électricité nucléaire, RTE nous garantit que grâce au réseau on pourra importer de l'électricité d'Allemagne produite au charbon ; mais ça, ça n'est pas grave parce que c'est du CO2, des gaz toxiques et des particules fines émises par le voisin et pas par nous. C'est bien ça ?
C'est sans réplique.
@ 4Vconsulting
Je ne pense pas que RTE fasse appel à la magie pour boucler ses scénarios :
Le critère de fiabilité du réseau qu'ils doivent respecter est une espérance moyenne de 3h de coupure par an.
Actuellement, on est plus à de l'ordre de 3 minutes.
Je suis persuadé que dans ses scénarii, RTE fait simplement un peu plus appel aux coupures tournantes de courant qu'aujourd'hui...
Une moyenne de 3h par an de blackout autorisé en France
Si on demandait aux français s'ils sont prêts à accepter 3heures de défaillance du système électrique chaque année, je parie qu'ils répondraient non.
Pourtant, c'est l'hypothèse que prend le RTE dans tous ses scénarios et il le fait en toute légalité puisqu'il se base sur le critère légal de sécurité d'approvisionnement.Critère qui a été défini il y a une vingtaine d'années sur la base de coût de l'énergie non distribuée, c'est à dire du coût des conséquences de la défaillance. Depuis l'usage de l'électricité s'est largement développé, mais aucune révision du critère n'a été effectuée.
J'aimerais avoir l'avis de MO sur ce problème.
Lisez https://ppe.debatpublic
Lisez https://ppe.debatpublic.fr/file/1436/download?token=54Fcvxbv de l'IED, qui est une étude sérieuse et explique les impasses des scenarii RTE.
En gros:
- une projection des consommations à 2030 irréaliste
- un optimisme sur les disponibiltés statistiques des ENR intermittentes alors que le sujet n'est pas statistique: on peut avoir 0 MW à 19 h en hiver s'il n'y a pas de vent, on peut le vérifier facilement sur les sites de eCO2 mix, ou Frauenhofer Energy Charts
- déploiement de la méthanisation et de la méthanation irréaliste également.
Je vous remets la question que j'ai posée à la Mo, sans réponse à ce jour:
Surréaliste et réaliste
Je suis d'accord avec 4Vconsulting.
L'étude de RTE est irréaliste (et surréaliste),
Je vous recommande de lire le livre de Rémy Prud'homme "le mythe des énergies renouvelables".
Le Danemark est le seul pays au monde qui a un taux d'électricité renouvelable proche de 40%. Mais ce n'est possible techniquement que grâce au stockage d'électricité via les barrages de Norvège et de Suède. Et tout cela conduit à un prix du MWh, qui est plus de deux fois supérieur au prix français.
Rappelons aussi que le Danemark est un petit pays, qui équivaut à la taille d'une région française.
Enfin, je mentionnerai l'échec de l'expérience des électricités renouvelables en Australie du Sud, qui a conduit à plusieurs pannes d'électricité, et à un coût prohibitif.
Puissance ne signifie pas production
Dans sa réponse à Monsieur Morey, le MO indique les puissances maximales qui ont pu être mobilisées par l'éolien et le solaire, mais pas le % de leur contribution à la consommation électrique du pays. Le MO peut-il combler cette lacune ?