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Question n°64

Questions sur les retours d'expérience des parcs à l'étranger

Ajouté par Jean-Pierre LE GORGEU (Lampaul-Ploudalmézeau), le
[Origine : Réunion publique]

La question suivante a été posée à l’oral au cours de la conférence-débat du 21 mai. Dans la mesure où elle est restée sans réponse, la commission a pris l’initiative de la publier sur le site afin qu’une réponse écrite lui soit apportée. Elle a pu faire l’objet de légères reformulations en la passant à l’écrit.

- "A partir des données d'un parc belge, le parc de Dieppe-Le Tréport ne produirait que 137 MW en moyenne pour une puissance installée de 496 MW. Pourquoi autant de différence ?"

De manière plus générale, une question a été soulevée par plusieurs intervenants au cours de cette conférence-débat :

- "Est-il possible de connaître le retour d’expérience des pays producteurs d’éolien en mer en termes de taux de disponibilités des parcs, de coût par MW installé, de création d’emplois et d’impact environnemental ?"

Date de la réponse:
Réponse de Eoliennes en mer Dieppe - Le Tréport (maître d'ouvrage), le
Réponse:

Bonjour, 

Il convient de distinguer la capacité installée d’un parc, somme de la puissance des éoliennes mises en place et exprimée en MW, de la production électrique d’un parc, relative à l’énergie par unité de temps délivrée par le parc en fonctionnement et exprimée en MWh.

Pour le parc éolien de Dieppe – Le Tréport, la production du parc est estimée à plus de 2 000 GWh/an. Cette estimation dépend principalement de la ressource en vent du site d’implantation et des caractéristiques techniques des éoliennes équipant le parc. Elle s’appuie sur les premières études de vent menées sur la zone du projet qui devront être confirmées par des mesures en cours.

Le « facteur de charge » d’un parc est le rapport entre l’énergie effectivement produite par un parc sur une période donnée et l’énergie qu’il aurait produite s’il avait fonctionné à sa puissance nominale durant la même période.

Afin d'évaluer la production annuelle du parc de Dieppe – Le Tréport et donc le facteur de charge du parc, le maître d'ouvrage a mené une étude détaillée de la ressource en vent du projet. Plusieurs campagnes de mesures de vent in situ ont été réalisées en parallèle, avec l'installation d'un mat de mesure et de plusieurs LiDAR, à terre et en mer. Couplées à l'utilisation des caractéristiques techniques de l'éolienne d'Adwen de 8MW ainsi qu'à la connaissance des différentes pertes (par effet de sillage du vent ?, pertes électriques), la modélisation de ces études indique un facteur de charge du parc de l'ordre de 40%.

Bien que ces chiffres soient à considérer prudemment du fait des caractéristiques propres à chaque site et chaque parc, les facteurs de charge des projets offshore européens s’établissent entre 35 et 45% selon les sites et les turbines utilisées.

- Les coûts d’investissements initiaux par MW installé

Le coût d’investissement initial d’un parc éolien en mer comprend notamment les coûts liés à la fabrication des composants (éoliennes, fondations, pales …), à l’installation en mer, au câblage, aux frais de développement et aux frais financiers. Il constitue la part principale du coût de production de l’électricité.

En 2013, le montant moyen des investissements initiaux était estimé en Europe à environ 3,17 million €/MW installé.

L’EWEA prévoit une tendance à la baisse de ces coûts d’investissement.

- La création d’emplois

 En France, 10 000 emplois directs et indirects sont attendus grâce au développement du secteur à l’horizon 2020, d’après les estimations du Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, 30 000 d’ici 2030. La dynamique de développement engagée par l’Etat grâce au lancement de deux appels d’offres (2011 puis 2013) vise à donner aux industriels du secteur la visibilité nécessaire aux investissements à même de pérenniser la filière, réelle garantie d’emplois.

Plusieurs pays européens se sont engagés plus précocement dans le développement de l’éolien en mer. En Allemagne, où la capacité installée en mer atteignait fin 2014 40GW, la filière industrielle comptabilise aujourd’hui 19 000 emplois. Elle a constitué un levier de croissance et de re-industrialisation important pour certaines zones. Le port de Bremerhaven, qui s’est reconverti dans le secteur en 2001, a ainsi vu son taux de chômage passer de 25% en 2001 à 14% aujourd’hui.

- Impact environnemental

Les impacts environnementaux éventuels d’un parc éolien diffèrent selon les espèces et les écosystèmes concernés, les phases du projet et les caractéristiques des zones d’implantation. Les retours d’expérience ci-dessous sont donc présentés à titre indicatif et sans prétention d’exhaustivité.

 

A-   Faune marine

Les nuisances sonores durant la phase chantier représentent l’impact majeur sur la mégafaune marine en raison de sa sensibilité auditive et de sa dépendance à l’audition.

Des retours d’expérience de parcs européens sur ce sujet existent et témoignent d’une perturbation temporaire en phase de chantier, marquée par un retour à la normale en phase d’exploitation. Ces exemples sont donnés à titre indicatif. Ils font cependant état d’un impact relativement neutre voir positif des parcs sur les mammifères marins passée la phase de chantier :

 (1) Sur le site d’Horns Rev 1 au Danemark, après une diminution de l’activité des marsouins observée pendant les opérations de battage, un retour à la normale a été observé après un an d’opération. Dans le cas du site de Nysted, Danemark, les niveaux normaux de l’activité des marsouins ont été retrouvés dans la zone de référence mais le niveau restait inférieur au sein du parc (WGMME, 2010).

(2) Quant au parc d’Egmond Aan Zee, Pays-Bas, une augmentation de l’activité des marsouins a été mise en avant au sein du parc, probablement due à l’effet, couplé ou non, de l’abondance de proies induites par le phénomène de récif artificiel et la diminution des nuisances induites par la navigation et le chalutage, interdits dans le parc (WGMME, 2010). 

(3) La télémétrie a été utilisée pour déterminer l’effet des éoliennes en mer sur les phoques veaux-marins d’un site danois (Tougaard et al., 2006[8]). Les analyses de positions de 21 phoques marqués et les suivis en bateaux indiquent que les animaux continuent de fréquenter la zone et les alentours du parc éolien pendant la phase de fonctionnement. Toujours au Danemark, le suivi des phoques veaux-marins du parc éolien de Rødsand indique que la population a baissé durant la construction des fondations, mais que celle-ci est revenue à la normale deux ans après les travaux (Teilmann et al., 2006b[9]).

 

B- Avifaune

Le risque de collision est souvent évoqué comme le risque majeur pour l’avifaune.

Il est pourtant rare que des oiseaux entrent en collision directe avec les éoliennes.  En effet, les retours d’expérience de parcs éoliens offshore de Nysted et Horns Rev au Danemark montrent que les oiseaux évitent les parcs éoliens, en modifiant leur trajectoire[10].

Des études radar ont montré que les oiseaux évitaient généralement les parcs éoliens, bien que les comportements soient spécifiques aux espèces. En effet, les oiseaux changent leur route de manière graduelle à la vue du parc. Ces modifications de trajectoire sont localisées aux alentours directs du parc éolien et n'ont pas conduit à modifier à grande échelle les couloirs migratoires.

Observation radar des migrations vers le Sud et vers le Nord sur le parc éolien d’Horns Rev (Danemark). Les flèches montrent l’orientation moyenne des directions de vol. Au Nord Est, le masque du radar ne permettait pas d’observer les oiseaux.

Les récents suivis menés sur le parc d’Egmond aan Zee aux Pays-Bas montrent par ailleurs que plus de 98% des oiseaux traversant le parc évitent de passer à proximité des éoliennes[11]

Pendant la période de migration, de nombreuses espèces volent à des altitudes où la collision avec les parcs éoliens en mer est peu probable. Ces mêmes espèces volent à de faibles altitudes généralement pour éviter les éoliennes, en circulant entre les mâts[12].  

Cette distance supplémentaire parcourue, ajoutée à leur trajet migratoire total, est considérée comme insignifiante au regard de leur dépense énergétique. Toutefois, chaque espèce réagit différemment face aux perturbations de l’environnement. En effet, les mouettes, les goélands et ou encore les cormorans montrent par exemple un comportement d’évitement plus occasionnel[13] 

Nous nous tenons à votre disposition pour tout complément d’information.



[8] Tougaard J, Carstensen J, Wisz MS, Teilmann J, Bech NI, Skov H (2006) Harbour porpoises on Horns Reef — effects of the Horns Reef wind farm. Tech rep to Elsam Engineering A/S, National Environmental Research Institute, Roskilde

[9] Teilmann et al., 2006. Marine mammals : seals and porpoises react differently. Danish Offshore Wind – Key environnemental issues.

[10] Final result of bird studies at the offshore wind fars at Nysted and Horns rev. NERI Report. National Environmental Research Institute. Denmark. P.100

[11] Effect studies offshore wind farm Egmond aan Zee. Final report on fluxes, flight altitudes and behaviour of flying birds. Page 271

[12] Final result of bird studies at the offshore wind fars at Nysted and Horns rev. NERI Report. National Environmental Research Institute. Denmark. P.14-15

[13] Final result of bird studies at the offshore wind fars at Nysted and Horns rev. NERI Report. National Environmental Research Institute. Denmark. P.83