Du 19 mars au 30 juin 2018, ce forum permet à chacun de donner son avis sur la PPE ou sur le débat public lui-même. Tous les avis sont rendus publics et ouverts aux commentaires. Ils seront pris en compte par la commission lors de la rédaction du compte rendu du débat.
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A ceux qui reprochent au gouvernement ou plutôt aux gouvernements de ne pas faire assez en matière de lutte contre le réchauffement climatique, je les invite à lire cet article du Huffington Post.
https://www.huffingtonpost.fr/2018/06/20/reforme-de-la-constitution-le-g...
Qu’y apprend-on ? On y apprend que la modification de la Constitution française va faire la part belle à la lutte contre le réchauffement climatique. Dans son article 1, la Constitution assurera que la République lutte contre le réchauffement climatique. Il s’agit d’une véritable avancée, car la Constitution s'engage réellement. C’est un changement de paradigme qui laisse pourtant une question centrale en suspens : le nucléaire a-t-il sa place dans l’électricité de demain ? Au regard de ses nombreux avantages (coût, non rejet de CO2, électricité bon marché, bassins d’emplois…) et de ses inconvénients maîtrisés (sûreté et traitement des déchets), le nucléaire doit rester l’axe autour duquel tourne la politique énergétique de la France.
Ma seule crainte est de voir la Constitution utilisée comme un argument contre le nucléaire alors qu’il a été démontré que le réchauffement climatique est combattu efficacement par le nucléaire… La France n’est malheureusement pas à un paradoxe près. Espérons que cette avancée ne se transforme pas en reculade. En tout, cas bravo au gouvernement s’il va bien au bout de la démarche !
Bonjour, je trouve extrêmement surprenant que dans le questionnaire en ligne dans le développement des types d'énergie, il ne soit fait référence que photovoltaïque alors que le solaire thermique a des applications individuelles et industrielles tout à fait honorables et pertinentes dans le cadre de l'effort national portant sur la réduction des consommations. Par exemple, un CESI, économise 80% d'énergie au rapport aux besoins de production d'ECS...
Nous sommes dans les années 2050. Les politiques énergétiques qui se sont succédé ont été jusqu'à interdire en France tous les chauffages utilisant des énergies fossiles. Trop de CO2 disaient-ils. Les usages de l'énergie sont maintenant massivement orientés vers l'électricité décarbonée d'origine nucléaire et renouvelable.
Monsieur et Madame Martin ont dû investir lourdement. Ils l'ont fait car ils sont sensibles au problème de l'efficacité énergétique et ils se sont consolés en se disant que c'était pour le bien de la planète puisque l'électricité était maintenant 100% décarbonée. Ils ont remplacé leur chauffage central au gaz par une pompe à chaleur air/air dernier cri . Ils ont renforcé lourdement l'isolation de leur logement. Ils ont acheté une voiture électrique dont la batterie se recharge automatiquement aux heures les plus creuses, grâce à un système basé sur l'intelligence artificielle.
Mais dès l'hiver qui a suivi ces investissements, quand les températures ont frôlé le 0°, il se sont rendu compte que les performances de leur pompe à chaleur n'étaient pas au rendez-vous et qu'il faisait froid chez eux malgré l'isolation renforcée. Alors ils ont dû s'acheter quelques radiateurs électriques d'appoint qu'ils démarrent quand les températures sont trop basses. Ils ont été des millions à avoir fait comme eux et maintenant, dès qu'il fait froid, le gestionnaire de réseau électrique est en situation de crise et les délestages tournants ponctuels ne sont pas rares.
Cela a été bien pire l'hiver suivant , quand l'Autorité de Sûreté Nucléaire a exigé l'arrêt immédiat pour vérification de 10 réacteurs nucléaires du fait de la découverte d'un défaut générique. Finalement sans gravité ont-ils dit au printemps... mais Monsieur et Madame Martin ont eu très froid tout l'hiver tant les coupures ont été nombreuses.
L' année suivante , Monsieur et Madame Martin ont décidé de prendre le taureau par les cornes et de puiser une nouvelle fois dans leurs économies. En début d'hiver, ils ont fait l'acquisition d'un BatteryWall 10, le haut de gamme de la société Volta, un ensemble de batteries de grande capacité leur garantissant 10 jours d'autonomie. De quoi faire face aux imprévus ! Mais voilà, c'était sans compter sur l'anticyclone qui s'est installé sur l'Europe pour trois semaines. Il a fait très froid en Europe et les éoliennes ont été presque partout à l'arrêt, faute de vent. Bien que cet hiver toutes les tranches nucléaires aient été sur le pont, la France a manqué d'électricité et le BatteryWall 10 a été vidé en seulement 8 jours. Monsieur et Madame Martin ont eu de nouveau froid chez eux pendant 2 semaines .
Un jour, alors qu'ils rentraient d'un long déplacement en voiture et qu'ils avaient mis en charge leur batterie comme tous les soirs, il ont été appelé à 22h pour se rendre au chevet d'un parent âgé qui venait de faire un malaise. Mais impossible de faire les 100 km qui les séparaient de ce parent. L'intelligence artificielle qui pilote la recharge de sa voiture tout en optimisant la facture d'électricité et en lissant la charge du réseau démarre habituellement la recharge de la batterie vers minuit...
Les Martin ont d'ailleurs renoncé à se racheter une voiture neuve depuis que les Chinois ont annoncé une hausse de 35 % des prix des voitures. Ils ont même fini par se demander si ces voitures électriques sont bonnes pour la planète, tant les émissions de CO2 de la Chine, qui fabrique maintenant environ 90 % des voitures électriques dans le monde, ont explosé ces dernières années.
Mais ils se sont vraiment mis en colère à l'occasion d'une visite rendue à des amis de l'autre côté de la frontière. Un contraste saisissant dans les paysages traversés : en France, des campagnes dévastées par le chômage et la paupérisation, avec de plus en plus de terres laissées à l'abandon du fait de la crise agricole. De l'autre côté de la frontière, des campagnes visiblement florissantes et bien entretenues par des agriculteurs en bonne santé économique depuis qu'ils complètent leur production traditionnelle par de la production de gaz renouvelable fabriqué à partir de cultures intermédiaires et de déchets agricoles.
La maison de leurs amis est toujours aussi confortable, même en hiver ! Ils ont conservé leur chauffage au gaz et eux aussi n'émettent plus de CO2, car leur gaz est renouvelable, provenant des fermes voisines ou parfois de gaz stocké en été et fabriqué à partir d'électricité renouvelable, quand à certains moments de l'année, la production excède la consommation. Leurs amis, qui se déplacent beaucoup pour le travail, sont ravis de leur nouvelle voiture hybride gaz/électricité. Quand la batterie est épuisée, ils roulent au gaz vert et peuvent faire le plein en trois minutes dans n'importe quelle station service du pays.
Alors Monsieur et Madame Martin sont furieux car ils se disent qu'on aurait pu mieux s'y prendre pour décarboner la France. Il ont froid chez eux et se demandent comment on a pu en arriver là.
L' usage plus repandu de l'énergie électrique propre en particulier dans les transports et le chauffage permet de lutter contre le réchauffement climatique. Il faut développer de nouvelles capacités électriques.
Il y a 30 ans les débats sur l'énergie en France se terminaient toujours par un débat/combat pour ou contre l'énergie nucléaire. Espérons sortir de ce débat bien réducteur. Le défi n'est plus en effet d'unir le pays autour de pourcentages sortis du chapeau mais de faire face et maitriser les enjeux nouveaux.
Trois évènements majeurs ont en effet émergé depuis les années 80 et qui façonnent notre avenir :
- Réchauffement climatique reconnu au niveau mondial et reconnaissance du rôle majeur de la combustion du charbon/gaz/pétrole joué dans ce réchauffement.
- Les particules fines générées par la combustion des ressources fossiles ont un impact sanitaire inacceptable, en particulier dans les grandes métropoles (transport, chauffage).
- Emergence/Elargissement de l'Europe avec un réseau électrique commun et en expansion permettant des échanges et des transferts.
Seule l'énergie électrique, à condition qu'elle soit décarbonée apporte une solution cohérente à l'échelle du continent, à ce triple défi. Comment par exemple pourrait-on en effet se satisfaire d'énergie éolienne ou solaire si en cas de défaillance (la nuit et manque de vent) on doit importer de l'énergie issue de ressources fossiles type charbon ou gaz d'un pays voisin européen. On a vu aussi les limites des systemes de filtration pour les véhicules en ce qui concerne les particules.
Pour permettre le transfert massif pour le transport et le chauffage vers l'énergie électrique, il y a besoin de créer de nouvelles capacités électriques très rapidement, des capacités fiables capables de produire de l'électricité en fonction de la demande. Il serait en effet aberrant de vouloir adapter la demande de l'électricité en fonction de la vitesse du vent ou des nuages qui passent.
Pour faire face à ce transfert massif indispensable qui s'annonce si on veut réellement relever les défis devant nous, je pense qu'il y a besoin déjà de maintenir en service toutes les capacités électriques décarbonées sur le pays. Il y a également besoin de construire de nouvelles capacités électriques décarbonées, fiables et pilotables. A ma connaissance, seules de nouvelles unités nucléaires permettent aujourd'hui de satisfaire aujourd'hui ce besoin. Cela n'empêche pas d'installer ici ou là des éoliennes ou des panneaux solaires qui permettent de développer localement des territoires, notamment ceux en difficulté.
J'espère que ce débat sur la PPE permettra de prendre des mesures courageuses qui préparent véritablement l'avenir européen, en considérant le besoin de développer massivement les usages de l'énergie électrique, et en privilégiant une offre électrique autosuffisante totalement décarbonée pilotable et fiable.
Nécessité de réaliser une évaluation de la politique actuelle de soutien public à la production électrique d'origine renouvelable. La transition énergétique ne peut être réalisée que par les collectivités locales et leurs habitants et sur la base de projets adaptés à leur contexte.
La problématique de l'aval du cycle nucléaire est seulement abordée par les périodes radioactives d'atomes issus des combustibles usés. Cette vision ne rend pas compte de la réalité.
On oublie que le nucléaire produit aussi des atomes stables et que ceux-ci purifiés auraient une valeur économiques. C'est pour cela que Thorensen pose la question les dechets nucléaires sont-ils des déchets sur google techstalks : https://www.youtube.com/watch?v=rv-mFSoZOkE
Pour les atomes radioactifs, le rayonnement n'est pas différent de ce qui existe dans la nature : https://www.energie-crise.fr/Quarante-ans-d-intox-le-soi-disant-probleme...
Ce rayonnement pourrait servir à purifier l'eau, ce qui a été testé avec des canons à électrons peut être obtenu par le rayonnement gamma issu des futs vitrifiés. L'aval du parc nucléaire pourrait purifier les eaux usées de 3 millions d'habitants puis au bout d'un siècle de 300 000 puis le siècle suivant de 30 000.
Au bout de trois siècles, on pourrait récupérer trois éléments chimiques que le nucléaire produit dans des flux compatibles avec la demande industrielle.
Si on enterre les futs vitrifiés au bout de 100 000 ans on a une mine d'uranium enrichi et de neptunium. Le neptunium a une chaine de désintégration qui n'émet pas de radon, il est donc moins nocif que l'uranium qui nous entoure. Il est donc ridicule de parler de déchets nocifs pendant des milliards d'années, d'autant qu'à cette date la radioactivité a diminué en dessous de celle de la mine d'uranium qui a donné naissance au combustible.
Il n'y a donc pas de déchets nucléaires, mais des matières radioactives que l'on peut valoriser au cours du temps.
Les performances techniques, environnementales et économiques des différentes filières de production d'électricité sont souvent comparées dans les médias (généralistes ou spécialisés), notamment quand un nouveau site de production éolien ou photovoltaïque est mis en service. C'est également le cas quand les promoteurs des EnR électriques veulent afficher qu'elles sont une alternative crédible aux moyens de production dit « programmables » que sont les productions électronucléaire ou thermique à flamme (programmable signifie que l'on peut faire varier la puissance produite en fonction des besoins). Le public peut être tenté de croire ces affirmations tant les articles sur le sujet sont à l'unisson.
Qu'en est-il en réalité ?
Les performances techniques et économiques des « fermes » éoliennes ou solaires (que nous appellerons ERI, pour Electricité Renouvelable Intermittente) ne sont absolument pas comparables à celles des moyens de production programmables. Voici, dans le détail, ce qu'il en est :
Puissance disponible : la puissance annoncée dans les médias quand une nouvelle ferme éolienne ou solaire est mise en service, est en réalité la puissance maximale atteignable quand les conditions météo sont optimales. Cette valeur n'est pas toujours disponible quand le réseau en a besoin et elle n'est pas corrélée avec les besoins de consommation. Dans le cas des moyens programmables, on fait varier la puissance fournie (de façon automatique et manuelle) pour répondre à une augmentation ou à une baisse de la consommation. Or voit bien que le service rendu au réseau n'est pas du tout comparable, ce que ne mentionnent jamais les médias (soit par ignorance, soit par manque d'objectivité).
Energie produite : dans le cas des ERI, le facteur de charge (rapport entre l'énergie déversée sur le réseau en un an et celle qui serait produite si les machines fonctionnaient en permanence à pleine puissance) est de l'ordre de 25% pour l'éolien terrestre et de 15% pour le solaire photovoltaïque. Pour les moyens programmables, la disponibilité est de l'ordre de 80%, c'est-à-dire que pendant 292 jours par an, une unité de production programmable peut fournir l'énergie nécessaire en fonction de la consommation. Cet aspect est peu connu du public car ces comparaisons ne sont jamais faites.
Performance environnementale, émissions de CO2 : les ERI sont présentées comme les championnes de la lutte contre les dérèglements climatiques car non émettrices de CO2. Pas un responsable politique Français n'a eu le courage d'affirmer lors de la COP 21 que les bonnes performances de notre pays en matière d'émissions liées à la production d'électricité sont essentiellement dues au nucléaire et à l'hydraulique. D'autre part, depuis 3 ans, les émissions globales de la France sont reparties à la hausse alors que dans le même temps la puissance installée des ERI a fortement augmenté ; ces mauvais chiffres montrent que les ERI, dans un pays où la production d'électricité est déjà largement décarbonnée, ne sont pas une solution.
Performance économique : les coûts de production annoncés pour les ERI sont totalement tronqués quand il s'agit de les comparer avec ceux des moyens de production programmables. Quand on lit par exemple que le coût de production de l'éolien terrestre est maintenant de l'ordre de 60 à 70 euros par mégawattheure produit, on oublie de préciser qu'il s'agit du coût direct, sortie usine. Si l'on veut comparer les coûts des différentes filières, il faut ajouter dans le cas des ERI :
- Les surcoûts du renforcement du réseau électrique pour absorber les flux électriques aléatoires ERI interrégionaux et transfrontaliers (flux qui sont beaucoup plus limités avec les moyens programmables),
- Le coût du maintien en service de moyens de production programmables (back-up) dont on doit faire varier la puissance à la hausse ou à la baisse pour répondre aux besoins de la consommation quand les conditions météo (vent ou ensoleillement) changent rapidement, ce qui est très fréquent sur une même journée,
- Le coût des mesures financières d'incitation qui ont été mises en place (contrats avec obligation d'achat à un prix élevé) pour encourager les investisseurs des ERI, mesures qui sont répercutées sur le consommateur d'électricité au travers d'une taxe : la CSPE. Le consommateur ne sait pas que le montant cumulé prévisionnel de ces mesures d'encouragement des ERI sur la durée totale des contrats actuels s'élève à 130 milliards d'euros. En 2017 il a représenté de l'ordre de 5 milliards d'euros.
Un jour (dans une vingtaine d'année au moins), le consommateur n'aura plus à supporter ces mesures d'incitation si elles disparaissent rapidement pour les nouveaux contrats, en revanche il faudra tenir compte du coût très important d'installation de nouveaux moyens de stockage massif d'électricité qui seront nécessaires si, comme le demande la LTECV, la part des ERI atteint environ 40% du mix de production d'électricité et que simultanément la puissance du parc électronucléaire est réduite.
A l'inverse, s'agissant de la production électronucléaire, le coût de production est complet, intégrant les provisions nécessaires pour procéder, le moment venu, au retraitement du combustible usé et à la déconstruction des réacteurs. La cour des comptes a d'ailleurs fourni en 2012 et 2014 une évaluation très détaillée du coût complet de la production électronucléaire. S'il existe des incertitudes sur ce que coûtera réellement la déconstruction d'un réacteur le moment venu, cette incertitude n'est en aucun cas de nature à faire varier le coût de production dans des proportions importantes car la part des provisions est faible dans le coût de production. Les Unités actuelles étant largement amorties, leur coût « cash » de production (c'est-à-dire correspondant aux charges d'exploitation, sans prise en compte du financement de nouveaux réacteurs) est de l'ordre de 30 euros par mégawattheure. Le coût d'objectif de l'EPR de série est annoncé dans une fourchette de 60 à 70 euros par mégawattheure.
A qui profite cette désinformation ? les contrevérités colportées par les médias tendent à faire apparaître aux yeux du public les ERI comme une filière pleine d'avenir et à décrédibiliser le nucléaire qui serait « une énergie du passé ». Les investisseurs promoteurs des filières ERI, les associations anti-nucléaires et les fournisseurs de gaz sont les principaux artisans de cette désinformation. Mais le pouvoir politique est, depuis longtemps, complice de ces lobbies alors qu'il devrait avoir le courage de donner à nos concitoyens une information objective. Quant à EDF, muselée par l'Etat, son actionnaire dominant, elle fait le gros dos.
Les énergies renouvelables semblent enthousiasmer une partie de la population.
Si l'on fait un calcul rapide : une éolienne a une puissance installée de 2MW avec un rendement ~ 10% ; une tranche de centrale nucléaire =1200MW avec une production 24h/24h.
1200/(2x10%)=6000
Il faudrait 6000 éoliennes pour produire l'équivalent d'une tranche de centrale !
Pour avoir traversé une partie montagneuse de l'Espagne, j'ai vu des éoliennes sur toutes les lignes de crêtes.
La meilleure énergie renouvelable est l'hydraulique, mais personne n'acceptera de nouveau barrage.
L'équation est difficile à résoudre.
Ma position : avant de démanteler les centrales nucléaires, il faut avoir mis en œuvre une production équivalente.
J'approuve totalement les positions de FNE et des ONG. Je ne vais donc pas répéter ce qui est écrit dedans. Cet avis n'est pas à destination des spécialistes, mais du grand public pour lui expliquer comment l'élaboration du bilan énergétique français est trompeuse. Entrons donc dans le détail.
1/ La disparition de l'uranium
Même peu informé, chacun sait quand même que la France fait une grande part de son électricité à travers l'énergie nucléaire. Qui dit énergie nucléaire, dit uranium. Et à Narbonne, nous le savons bien puisqu'une usine d'AREVA, devenu récemment ORANO, voit arriver le quart de l'uranium mondial qu'elle purifie avant de l'envoyer vers l'enrichissement. Prenons donc le dossier du débat et cherchons toutes les pages où se trouve le mot uranium. Surprise ! Il ne se trouve que deux fois :
page 8 : l'électricité est produite à partir d'uranium pour le nucléaire.
Page 153 : des importations de combustibles (gaz naturel et uranium)... mais cette page est un peu spéciale car c'est une reproduction d'un document de RTE (qui gère les lignes THT) ;
Donc bilan : le mot uranium a disparu du document. Dans quel but et par quoi est-il remplacé ?
2/ Pourquoi fait-on disparaître l'uranium ?
En fait les gouvernements français, quels qu'ils soient, ont toujours considéré que le nucléaire était une énergie française. Ce qui était vrai quand l'uranium était extrait du sol français, mais cela fait bien longtemps que ce n'est plus le cas. Mais la philosophie n'a pas changé : le nucléaire est une énergie française.
Mais, dans ce cas, il ne faut pas qu'on importe la matière première qui sert à faire cette énergie. Donc on oublie l'uranium et d'ailleurs on peut lire (p. 102) « La production nationale, qu'elle soit issue de sources renouvelables ou nucléaire, limite la dépendance aux importations ».
3/ Par quoi le remplacer ?
Quand on fait un bilan énergétique, il faut prendre en compte tout ce qu'on produit sur le territoire national auquel on ajoute tout ce qu'on importe dont on déduit tout ce qu'on exporte.
Donc, le nucléaire étant vu comme une énergie française va apparaître dans ce qu'on produit sur le sol français. Et comme ce sont dans les réacteurs nucléaires que cette énergie apparaît,
on va compter la chaleur produite dans les réacteurs nucléaires qu'on inscrit en plus dans une colonne électricité !
4/ Quel est l'intérêt de tout ce micmac : la notion d'indépendance énergétique
Dans tous les pays du monde, on se pose la question de savoir quelle est la part d'énergie que je produit par rapport à mes besoins. C'est ce qui donne une idée de l'indépendance énergétique du pays :
- si un pays produit toute son énergie : il est 100% indépendant
- s'il en produit la moitié et qu'il importe l'autre moitié : il est 50% indépendant
- s'il importe la totalité : il est 0% indépendant, et donc 100% dépendant
Donc la France va pouvoir commencer à calculer son indépendance énergétique. On trouve page 8 la répartition des énergies primaires qui approvisionnent notre pays en pourcentage (c'est plus simple que de prendre les chiffres exacts).
Donc sont françaises les énergies nucléaires, les renouvelables thermiques (bois énergie) et les déchets et les énergies renouvelables électriques, soit 44% + 9% + 3% = 56%
Bingo : grâce au nucléaire (uranium totalement importé) la France est indépendante à 56%
5/ Mais il y a plus drôle : plus il y a de pertes, plus nous sommes indépendants
En effet, pour compter l'énergie nucléaire, on a mis la chaleur produite dans les réacteurs. Mais la production d'électricité entraine beaucoup de pertes : en gros les 2/3 de la chaleur produite dans le réacteur chauffe les petits oiseaux ou les petits poissons et seul 1/3 fournit de l'électricité.
Et on calcule l'indépendance sur l'énergie primaire, donc en incluant les pertes !
Donc plus il y a de pertes, plus nous sommes indépendants. Si le rendement d'une centrale nucléaire était moins bon, par exemple 20% au lieu de 33% , nous serions plus indépendants.
6/ Et pire encore, avec le nucléaire, on est plus indépendant qu'avec le solaire ou l'éolien.
On arrive au bout des effets pervers de ce genre d'exercice : Si demain on remplace toute l'électricité nucléaire par des énergies électriques renouvelables (hydraulique, solaire, éolien), nous serons moins indépendants. ABSURDE ! Et pourtant vrai vu la méthode de calcul !
Vérifions : chaque fois qu'on utilise réellement un kWh
- s'il provient d'un réacteur nucléaire, on comptera l'équivalent de 3kWh comme approvisionnement en énergie primaire (le kWh + les 2kWh de pertes)
- s'il provient d'énergies renouvelables, comme elles n'ont pas de pertes (ou quasiment pas), on comptera 1 kWh comme approvisionnement en énergie primaire.
Du coup, cette électricité pèse beaucoup moins dans l'approvisionnement initial, puisqu'il n'y a pas de pertes, et nous sommes moins indépendants !
Donc finalement les mots nous trompent et les chiffres nous mentent : l'uranium a été escamoté et nous ne sommes pas indépendants puisque l'uranium est importé.
7/ Alors que proposons-nous ?
- réintégrer l'uranium comme produit importé en comptant sa capacité à produire de la chaleur dans un réacteur
- mettre deux colonnes séparées, une pour le nucléaire et une pour les énergies électriques renouvelables
Réussir la transition énergétique suppose d'abord de définir les bons objectifs. Plusieurs sont mis en avant au niveau de l'Etat :
- réduire les émissions de GES (Gaz à effet de serre) : un facteur 4 d'ici 2050
- baisser la consommation d'un facteur 2 d'ici 2050
- réduire la part du nucléaire à 50% dans la production d'électricité
Réduire les émissions de GES :
Le consensus scientifique est clair : l'humanité va à la catastrophe si elle ne réussit pas à réduire ses émissions de GES. Cet objectif est donc prioritaire et a été établi comme tel à la COP21. Dans le domaine de l'énergie, l'électricité française étant largement dé-carbonée, les progrès possibles à ce niveau sont limités à la fermeture des quelques centrales fossiles en fonctionnement. Les émissions de GES dues à l'énergie sont essentiellement celles du chauffage et des transports. Les progrès possibles sont :
- la diminution des consommations chauffage (donc l'isolation des bâtiments),
- le transfert de la consommation résiduelle de chauffage (fuel ou gaz) vers l'électricité dé-carbonée en utilisant des pompes à chaleur ; la chaleur injectée dans les bâtiments est alors aux 2/3 renouvelable.
- La diminution des dépenses énergétiques de transport : augmentation des rendements des moteurs thermiques, développement des transports collectifs, diminution des besoins en transport (circuits courts pour les marchandises, télétravail...)
- Le transfert vers une électricité dé-carbonée de transports voitures et trains.
Tout cela est possible et prioritaire.
Baisser la consommation d'énergie d'un facteur 2 d'ici 2050 :
Cet objectif louable mais pas forcément réaliste est un bon challenge. Les principaux leviers sont l'isolation des bâtiments et les progrès en efficacité énergétique. Mais il faudra aussi fortement réduire nos demandes en services rendus par l'énergie et les transformations sociétales correspondantes sont loin d'être négligeables. Un autre aspect est que cette réduction de consommation énergétique ne veut pas dire réduction de la consommation d'électricité car ce vecteur merveilleux, s'il est dé-carboné, doit aussi remplacer les fossiles dans le chauffage et les transports (voir l'objectif premier). On peut aussi espérer une ré-industrialisation du pays utilisant des robots (électriques) et on sait que les « data centers » prendront une place croissante dans la consommation d'électricité. S'ajouteront d'autres besoins en électricité pour, par exemple, transformer de la biomasse (renouvelable) en carburant de synthèse. On peut donc même conclure que la baisse de la consommation électrique n'est pas un but souhaitable. Cette affirmation, vraie en France, l'est aussi au niveau du monde.
Réduire la part du nucléaire dans la production d'électricité :
L'objectif de réduire la part du nucléaire à 50% de l'électricité française est énoncé dans la loi Transition Energétique et Croissance Verte. Il peut être contradictoire avec l'objectif de décroissance des GES si la diminution de la part du nucléaire conduit à une croissance des équipements fonctionnant avec des fossiles, c'est-à-dire si les énergies renouvelables sont insuffisantes pour remplacer le nucléaire arrêté. La question sous-jacente est celle de l'intermittence des principales énergies renouvelables électriques que sont l'éolien et le photovoltaïque. Il faut compenser cette intermittence qui peut être sévère dans les soirées d'hiver (pas de soleil), en cas d'anticyclone prolongé (pas de vent) pendant une période froide. Il faut alors disposer de sources pilotables qui, si on se limite aux énergies renouvelables, peuvent être des centrales thermiques à biomasse ou l'hydraulique. Or, il se trouve que ces sources sont limitées et insuffisantes même en les développant au maximum. Une façon de gonfler la contribution relative de ces sources renouvelables pilotables est de baisser la consommation totale, de la rendre partiellement flexible en la décalant partiellement dans le temps, et de faire appel aux importations. Encore faut-il que les pays voisins, qui, eux aussi manquent souvent en même temps de soleil et de vent (large anticyclone européen) puissent fournir l'électricité aux bons moments. Cette gymnastique peu réaliste est celle qui est souvent mise en œuvre dans les scenarii qui surestiment la place que peuvent prendre les énergies renouvelables dans le bouquet électrique. Elle se heurte au fait que, comme discuté ci-dessus, la décroissance de la consommation électrique n'est pas souhaitable.
Une solution est de faire appel à des systèmes de déstockage d'électricité préalablement stockée pendant des périodes de surproduction éolienne ou photovoltaïque. Malheureusement, les techniques pour stocker l'électricité sont nombreuses mais aucune n'est adaptée à un stockage important (des TWh) sur des périodes longues allant de la durée d'un anticyclone qui paralyse les éoliennes (10-15 jours) à plusieurs mois permettant d'utiliser en hiver l'abondante énergie solaire de l'été. Sur de courtes périodes (jour/nuit), les batteries seront une solution onéreuse mais possible. Sur des périodes un peu plus longues, le stockage mécanique des STEPS est déjà très adapté mais limité. Pour les périodes plus longues et/ou pour des quantités importantes de l'ordre du TWh, seule la solution power-to-gas-to-power semble possible mais très onéreuse et avec des rendements faibles (nettement inférieurs à 50%) qui accroissent encore les prix.
On ne parvient pas aujourd'hui à résoudre le problème de l'intermittence éolienne ou solaire sans faire appel à des installations dites de back-up utilisant soit des fossiles soit le nucléaire. Les premières (choix de l'Allemagne) présentent l'inconvénient majeur des GES, mais aussi celui de la pollution. La seconde (choix de la France) se heurte à la volonté politique répandue de sortir ou de limiter le nucléaire, volonté faisant écho à la peur d'un accident dispersant des déchets fortement radioactifs. Cette crainte est compréhensible, même s'il est établi que les dégâts sanitaires par MWh produit sont, accidents de Tchernobyl et Fukushima compris, bien plus faibles avec le nucléaire qu'avec les fossiles (voir par exemple : http://academie-technologies-prod.s3.amazonaws.com/2017/07/13/09/14/40/4...).
Il semble aujourd'hui impossible de sortir purement et simplement du nucléaire. La réduction à 50% de production donnée dans la loi est un compromis qui peut d'ailleurs se discuter puisqu'il ne réduit pas la crainte d'un accident. C'est même l'inverse car le nucléaire risque de devenir la technique de compensation de l'intermittence avec un fonctionnement très variable dans le temps pour suivre les fluctuations rapides de vent et de soleil, ce qui peut induire un vieillissement prématuré des équipements. Un tel fonctionnement induit aussi des surcoûts puisque le facteur de charge des réacteurs va diminuer alors que le coût principal de cette technologie est celui de l'équipement et de son amortissement.
La seule attitude scientifiquement et économiquement raisonnable est aujourd'hui d'acter le fait que l'on a besoin du nucléaire. Il faut donc envisager son futur en termes de remplacement progressif des réacteurs actuels avec, comme priorité, la sûreté permettant de minimiser à un faible niveau les conséquences d'un accident au demeurant très improbable. Les filtres à sable, les adsorbeurs passifs d'hydrogène, la force d'action rapide nucléaire d'EDF répondent à ces exigences.